Depuis plusieurs années, un projet de développement immobilier fait parler de lui à Ixelles. Il s’agit du projet concernant l’îlot formé par les rues de Washington, Hector
Denis et de l’Abbaye, à proximité immédiate du parc Tenbosch. Il vise à rénover un ancien hôtel particulier, à démolir des annexes et un immeuble moderniste et à construire un ensemble de quatre nouveaux immeubles, ainsi que deux parkings en
sous-sol.

Ce projet comporte de nombreuses dérogations, notamment en matière de hauteur de façade et de toiture, mais aussi de profondeur. La dernière enquête publique le concernant a rassemblé pas moins de 43 réactions.

Ce projet a fait l’objet d’un permis d’urbanisme délivré le 22 janvier dernier. La décision semble avoir surpris tout le monde ; les riverains, la commission de concertation, mais aussi la commune d’Ixelles, qui n’a pas hésité à introduire un recours à l’encontre du permis auprès du gouvernement.

Le dossier avait d’ailleurs fait l’objet d’un débat au conseil communal d’Ixelles en juin 2019 sur la base d’une interpellation citoyenne. Au cours de celui-ci, la majorité des groupes politiques avaient confirmé leur opposition au projet tel qu’il était présenté.

De nombreux points posent problème dans ce projet. Sur le plan du patrimoine, il prévoit la rénovation de l’hôtel particulier de style éclectique et la démolition de ses dépendances, édifiées pour le comte de Mérode par l’architecte Joseph Prémont
en 1912. Cette rénovation est évidemment une bonne chose, mais la décision de démolir les annexes de cet hôtel particulier est surprenante.

La démolition de l’immeuble moderniste internationaliste pose également question. Cet
immeuble a été construit en 1965 par l’architecte Franchimont. Il s’agit d’un immeuble récent et sa démolition pose question quant aux aspects de durabilité et d’énergie grise.

Par ailleurs, l’immeuble est construit en recul par rapport à l’alignement, ce qui permet d’en limiter la présence dans le paysage urbain, et donc de mettre en valeur la façade de l’hôtel particulier voisin. La commission de concertation et la commune d’Ixelles plaident donc pour le maintien de la structure de cet immeuble.

Un autre élément qui nous interpelle est celui des parkings souterrains. La Région autorise la création de 66 emplacements en sous-sol pour 49 logements et un espace de bureaux.

Les bâtiments mitoyens au 178 de la rue de Washington et au 13 de la rue Hector Denis présenteront deux niveaux de sous-sol pour un total de dix-huit emplacements de stationnement. Les deux accès à ces parkings seront quant à eux situés rue de Washington, aux extrémités du projet. Cela pose plusieurs questions. Pourquoi prévoir un nombre si élevé d’emplacements ? Un total de 66 emplacements pour 49 logements, c’est plus que le minimum requis par le règlement régional d’urbanisme (RRU) dans sa version actuelle et beaucoup plus que ce que prévoit le RRU dans sa
version en cours de révision.

Cette question du parking est d’autant plus importante que les riverains s’inquiètent de
l’impact cumulé de différents projets immobiliers à l’étude ou en cours dans le même quartier que le projet considéré, sans qu’aucune étude d’incidence globale n’ait été réalisée. Si des proportions similaires de stationnement sont utilisées pour maximiser la capacité de stationnement dans tous les autres projets, comme c’est le cas dans celui dont nous parlons, l’effet cumulé de ces différents projets risque d’entraîner une hausse de la pression automobile, ce qui est radicalement contraire aux objectifs régionaux et communaux en la matière.

Par ailleurs, de nombreux projets fonctionnent avec un seul accès. Le fait de les placer aux extrémités du projet envoie le message suivant : les nuisances liées à ces accès seront subies par les riverains des propriétés existantes voisines et non par les futurs
occupants. Cela ne favorise évidemment pas l’adhésion du quartier au projet. Est-il vraiment nécessaire de créer deux niveaux de sous-sol sous les bâtiments mitoyens 178 Washington et 13 Hector Denis qui n’accueilleraient que dix-huit places, alors que des niveaux de sous-sol existent sous l’immeuble moderniste et pourraient suffire à
répondre aux besoins en matière de stationnement ?

En ce qui concerne la typologie des logements, le projet comporte une majorité de logements de petite taille qui ne répondent pas aux besoins des familles. Il ne comporte que sept appartements de trois chambres et un appartement de quatre
chambres. Une révision de ce programme en vue d’accueillir davantage de grands logements permettrait également de diminuer les besoins en stationnement et rendrait d’autant plus inutile la création de deux niveaux de sous-sol sous les bâtiments mitoyens 178 Washington et 13 Hector Denis.

Pourquoi est-il autorisé de détruire les annexes d’un hôtel de maître ? La Commission royale des monuments et des sites (CRMS) a-t-elle été consultée sur ce point et quel a été son avis ? Une réelle étude patrimoniale a-t-elle été menée ? La démolition de l’immeuble moderniste de 1965 a-t-elle été étudiée au regard de son impact environnemental ? L’hypothèse du maintien de la structure de cet immeuble, quitte à ce que certains éléments de son architecture soient revus, a-t-elle été sérieusement étudiée ?

Pourquoi la Région favorise-t-elle un ratio si élevé d’emplacements de stationnement ? Qu’est-ce qui justifie d’aller au-delà de la norme minimale prévue par le RRU dans sa version actuelle ?

Cette décision n’est-elle pas contraire aux objectifs du plan Good Move ? La création de deux niveaux de sous-sol sous les 178 places du parking Washington et les 13 places du parking Denis n’est-elle pas inutilement disproportionnée pour la création de seulement 18 emplacements de parking ?

Pourquoi créer deux accès distincts à ces parkings souterrains aux extrémités du projet, et non un seul au cœur de celui-ci ? Une modification de la typologie de logements, qui prévoirait davantage de logements de grande taille, ne diminuerait-elle
pas le besoin de stationnement et, partant, de niveaux de sous-sol ?

Le Collège d’urbanisme s’est-il prononcé sur le recours ? Si oui, pourriez-vous nous faire part de la teneur de son avis ?

Le gouvernement s’est-il prononcé sur le recours ? Si oui, pourriez-vous nous indiquer la teneur de la décision et les options prises par le gouvernement sur les différents points évoqués dans la présente interpellation ?

Mon interpellation complète et la réponse du Secrétaire d’Etat ici:
http://weblex.brussels/data/crb/biq/2019-20/00104/images.pdf#page=79